Victoire | Timac Agro enfin condamnée pour pollution de l'air
À Saint-Malo, la multinationale Timac Agro a multiplié les infractions et causé des pollutions de l’air à l'ammoniac. La justice vient de rendre un jugement à la hauteur des attentes des associations de protection de la nature qui réclamaient justice.
Le tribunal judiciaire de Brest vient de donner raison aux associations (Eau et Rivières de Bretagne, Bretagne Vivante et France nature environnement) qui alertent depuis longtemps sur les graves et multiples infractions de Timac Agro. La multinationale est condamnée à leur verser des dommages et intérêts pour réparer le préjudice causé par les nombreux dépassements des valeurs limites d'émission d'ammoniac entre 2018 et 2021.
« Un exemple encourageant »
Dans son délibéré du 22 février 2024, le Tribunal judiciaire de Brest reconnaît la responsabilité de Timac Agro. La multinationale est condamnée à payer la somme de 25.000 euros aux associations victimes : Eau et Rivières de Bretagne, Bretagne Vivante et France Nature Environnement.
"L’ampleur de ces manquements, leur persistance dans la durée, ainsi que leur impact sur la qualité de l’air et de l’eau permettent de caractériser un préjudice important des associations, dont l’action en faveur de la préservation des milieux naturels a été rendue particulièrement difficile, voire localement impossible, du fait de ces pollutions répétées, préjudice qui sera justement évalué à la somme de 25.000 pour chacune d’entre elles", annonce le juge.
Pour Rozenn Perrot, administratrice d’Eau & Rivières et représentante de l’association à la commission de suivi du site de l’entreprise, ainsi qu’à Air Breizh : « Ce jugement est encourageant, dans la mesure où il reconnaît pleinement le sens de nos préoccupations. Une telle condamnation peut servir d’exemple pour d’autres industriels et dissuader ce type de délinquance environnementale. »
Extraits importants du jugement
- "L’ammoniaque est considéré, comme cela ressort du Schéma régional climat air énergie de Bretagne, comme un facteur d’eutrophisation."
- "Il participe à l’acidification des sols et contribue également à la formation de particules par association avec les oxydes d’azote."
- "Il contribue à la problématique régionale des nitrates."
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"Ainsi, les émissions d’ammoniaque de la S.A.S.U. TIMAC AGRO, de par leur redéposition assez rapide sur le sol, ont participé à l’eutrophisation des rivières et du littoral breton."
« Une reconnaissance de l’action des associations »
Pour Bernard Goguel, représentant de Bretagne Vivante au sein de la commission de suivi de site de l’entreprise : « Ce jugement est une reconnaissance de l'action des associations et de la société civile qui, en suivant sur le long terme les exploitants industriels, défendent les intérêts collectifs, la santé humaine et la qualité de notre environnement. ».
Les faits : de multiples dépassements atteignant plus de 10 fois la valeur limite d'émission d'ammoniac autorisée
Grâce à la mobilisation des associations de protection de la nature et des citoyens et citoyennes, un suivi des émissions atmosphériques a été mis en place en 2018. Ces derniers ont alors démontré que les niveaux de rejets d'ammoniac par les unités de production de Timac Agro à Saint-Malo méconnaissent gravement et constamment les valeurs limites réglementaires.
Les données accessibles sont édifiantes ! En 2018 et 2019, les niveaux de dépassement sont supérieur à 10 fois la valeur limite. En 2021, des dépassements ont de nouveau été enregistrés. Pourtant, la société Timac Agro a été mise en demeure par les services de l’État dès 2018 de « respecter la valeur limite de concentration en ammoniac sur l'ensemble de ses émissaires ». Cela n’a pas été suivi d’effets. Timac Agro a tardé à modifier son processus de production, faisant fi des conséquences environnementales et des injonctions administratives.
L’ammoniac nuit à l’environnement et la santé humaine
Pour rappel, l’ammoniac impacte l’environnement et les milieux aquatiques. Il est aussi un précurseur des particules fines, qui sont responsables chaque année de 40 000 décès prématurés1. Jean-François Deleume, médecin et représentant d'Eau et Rivières de Bretagne au Plan régional santé environnement précise ainsi que « les rejets d'ammoniac dans l'air entraînent une multiplication de particules fines toxiques pour la population générale provoquant des maladies cardiovasculaires et respiratoires. Pour les salariés des usines, le risque d'inhalation est avéré, il peut causer de graves irritations du nez, de la gorge, des yeux ou de la peau. ».
1Rapport 2021 de l’évaluation quantitative d’impact sur la santé de la pollution de l’air (EQIS)
Pour que les pollutions à l'ammoniac cessent sur le territoire breton
Qu'il se déploie dans les airs ou retombe dans les eaux, l'ammoniac, en forte concentration, ne saurait être considéré autrement que comme un facteur grave de pollution. Les associations de protection de l’environnement mobilisées ont pleinement conscience de cet enjeu pour le territoire breton, très largement affecté par la pollution à l'ammoniac. « Notre combat contre la pollution de l’air continue », conclut Rozenn Perrot.
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