Pourquoi nous avions déposé un recours contre Bridor

01 juin 2023
Pourquoi nous avions déposé un recours contre Bridor

Eau et Rivières de Bretagne se félicite, comme les autres structures impliquées dans ce dossier, de l'abandon du projet Bridor. A l'occasion, nous republions notre article initialement publié le 19 novembre dernier qui détaille les nombreuses raisons de cette opposition et du choix d'un recours

 

Le 5 novembre dernier, Eau & Rivières de Bretagne, Bretagne Vivante et la Confédération Paysanne d’Ille-et-Vilaine avaient déposé un recours commun contre le projet Bridor à Liffré (35). Explication de ce recours d’intérêt général.

 

Le projet d'usine situé sur plus de 21 ha de terres agricoles et naturelles vise, à terme, une production de 650 tonnes/jour de pains et viennoiseries industrielles destinée au marché mondial, ce, à hauteur de 70 % de sa production. Or, malgré les nombreuses « bonnes publicités » diffusées dans la presse, le projet n’arrive pas à prouver sa légitimité.

 

Cela a d’ailleurs été soulevé par les nombreux experts consultés. On peut pour exemple citer le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel (CRSPN) qui notait que « l’intérêt public majeur n’est pas vraiment justifié ». Ou bien encore l’OFB, précisant que « Les raisons du choix de l'implantation du site à Liffré ne présentent pas de critères environnementaux ni naturalistes ».

 

Mais surtout, nous alertons qu'en l'état, et en dépit du fait que les conséquences du dérèglement climatique sont, jour après jour, de plus en plus visibles (doit-on encore rappeler les vagues de canicules et de sécheresses qui nous ont frappés cet été) et qu’il devrait donc être urgent de prendre toutes les mesures de transition qui s’imposent, le projet Bridor s'insère en totale contradiction avec ces exigences. Cela découle de la nature même du projet qui consiste, en se basant sur des matières premières d’origine parfois très lointaines, à les transformer en des produits congelés avant de les transporter à nouveau pour l’international. L’empreinte carbone du projet sera d’ailleurs, de l’aveu même des porteurs du projet, désastreuse, et représenterait au minimum chaque année

 

L’équivalent de 500 Airbus A330 faisant le tour du monde1

 

Mais en plus du fait que ce projet se fonde sur une vision de l’aménagement du territoire révolue, il comporte de nombreuses autres lacunes qui n’ont pas été comblées à l’issue des différentes phases de la consultation.

 

Ainsi, alors même que la destruction et la fragmentation des écosystèmes constituent l’une des cinq causes d’érosion de la biodiversité, le site d’implantation est situé, comme le rappelle le CRSPN, « sur une jonction territoriale entre la forêt de Rennes et la forêt de Liffré, dont l’inclusion dans un périmètre Natura 2000 est envisagée. ». Sur ce point aussi, il ressort de l'analyse des experts consultés (OFB, CRSPN, SAGE Vilaine ou bien encore l'autorité environnementale) le manque de sérieux du projet tant sur la qualité des inventaires réalisés que dans la mise en œuvre de la séquence « Éviter/Réduire/Compenser ». Les carences s’accumulant à chaque étape du dossier, elles font au final peser des menaces disproportionnées sur la biodiversité.

 

En savoir plus sur l’impact sur la biodiversité en consultant l’article de Bretagne Vivante

 

Sans revenir sur les nombreux arguments développés dans notre recours, nous dénonçons en particulier la consommation excessive d’eau potable, 187 250 m³ par an ! Une consommation qui représente celle d’une ville de près de 6 250 personnes ! Cette appropriation d’un bien commun, au profit d'un seul usager, et au détriment du plus grand nombre, est particulièrement grave dans un territoire où cette ressource est en déficit chronique. Nous tenons à rappeler que seuls 3 % des cours d’eau du département sont en bon état et qu’une majorité d’entre eux sont dégradés au regard du paramètre quantitatif. Si la Bretagne bénéficie en effet d’un climat tempéré, le secteur du bassin rennais est parmi les moins arrosés de France avec une pluviométrie d’à peine 700 mm par an. Dans ce cadre il convient de prioriser les usages de l’eau, la réglementation2 précisant bien que ce sont les usages pour l’accès à l’eau potable des citoyens et la protection des milieux aquatiques qui doivent être assurés en priorité, les usages industriels venant bien après.

 

L’association dénonce donc cet énième projet agro-industriel de grande ampleur en totale contradiction avec l'urgence de la transition climatique et de la nécessaire sobriété dans l'utilisation des ressources. Projet qui n’arrive, en outre, ni à justifier de son intérêt, ni à prouver son absence d’impact sur la biodiversité, et encore moins sur la ressource en eau.

 

L’association Eau & Rivière de Bretagne a donc décidé, avec Bretagne Vivante et la Confédération Paysanne d’Ille-et-Vilaine, de contester l'autorisation préfectorale devant la justice afin de faire prévaloir l’intérêt général.

 

 

En savoir plus

 

2L. 211-1 du code de l’environnement.

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