Mâchefers !  Un non ferme et argumenté [20/05/16]

20 mai 2016
Mâchefers !  Un non ferme et argumenté [20/05/16]

Actuellement autorisée à traiter 33 000 tonnes de mâchefers (résidus des déchets incinérés) par an sur sa plateforme de maturation de Plabennec, l’entreprise SCORVALIA à majorité privée (51%  des parts Eurovia) sollicite une autorisation pour 45 000 tonnes sur le même site. En plus des mâchefers produits à Brest-Spernot, elle souhaite récupérer aussi ceux des incinérateurs de Briec et de Carhaix. Cette demande n’est ni valablement justifiée par le dossier, ni légitime en soi.

Réduction des déchets ?
Tout d’abord, une politique durable de gestion des déchets doit tendre vers une réduction des tonnages à traiter. Le Plan finistérien de 2009 donne des objectifs de réduction des tonnages incinérés. Désormais, la compétence Déchets est de niveau Régional et doit donc s’envisager à cette échelle, ce que ne fait pas le dossier de Scorvalia. Le Conseil Economique, Social et Environnemental Régional de Bretagne dans son document de mars 2015 et intitulé « Les déchets en Bretagne, vers un cercle vertueux » indique, en page 392, cette préconisation : « Diminuer les quantités incinérées et poursuivre l’amélioration des rejets des incinérateurs (fumées, cendres, résidus et mâchefers) et donc mieux faire respecter la hiérarchie des déchets ». La politique nationale impose que la prévention, le tri, le recyclage et la valorisation matière et organique soient privilégiés – et que les traitements par incinération (fût-ce avec valorisation énergétique) et l’enfouissement soient au contraire réduits comme mode de gestion dégradés.

Demander une augmentation des tonnages à traiter est donc contraire aux objectifs départementaux, régionaux et nationaux et aux intérêts de l’environnement.
Le commissaire enquêteur est donc invité, en cas d’avis favorable, à émettre au moins une réserve : ne pas autoriser une augmentation des tonnages à traiter (33 000 t/an au maximum).

Impacts potentiels sur l’eau
Eau & rivières de Bretagne possède une défiance à l’encontre de l’utilisation des mâchefers en technique routière. Avec ses associations adhérentes, elle s’inquiète des risques de pollution, notamment des eaux et  milieux aquatiques, liés à l’utilisation des mâchefers en sous-couche routière ou sous les parkings. En milieu humide (ce qui est souvent le cas en Bretagne), ces résidus peuvent libérer dans l’eau à moyen ou long terme une partie de ses métaux lourds, ses dioxines ou furanes. Or, le dossier ne dit rien du risque d’écotoxicité et n’informe pas le public de la façon dont ce risque est contrôlé. Il est remarquable que l’arrêté d’autorisation de l’usine d’incinération de Brest ne prévoit aucun contrôle de la dangerosité des mâchefers produits, et que les bilans effectués depuis des années sur les mâchefers de l’usine n’apportent pas d’information non plus.

L’exploitant n’apporte pas la preuve qu’il a jusqu’ici valorisé les mâchefers dans des conditions conformes à la réglementation et qu’il existe un suivi de ceux-ci. Le dossier se contente de fournir une liste de communes et de tonnages utilisés. Pour savoir si la réglementation a été respectée, il aurait au contraire fallu que le public connaisse :

  • Coordonnées GPS des chantiers
  • Carte routière de localisation
  • Données géologiques, hydrographiques, nature des sols (inventaire des zones humides et des cours d’eau de la commune, niveau de la nappe, localisation des zones de captage, des étangs, puits, sources... les plus proches)
  • Entreprises utilisatrices
  • Date et durée du chantier ; durée de l’exposition des mâchefers aux eaux météoriques avant leur recouvrement (bitume) ou leur revêtement (terre naturelle)
  • Nature du chantier
  • Conditions météorologiques en phase chantier.

Augmentation des flux de métaux lourds à la Rade de Brest !
Les eaux résiduaires de la plateforme (lixiviats avec métaux lourds) sont aujourd’hui transportées par camion à la station d’épuration du Port de commerce à Brest. Le projet de SCORVALIA prévoit de construire une canalisation pour rejoindre le réseau d’eaux usées de Brest Métropole. Or, une STEP ne peut pas traiter les métaux lourds. Même s’ils sont lissés dans le temps et dilués, les flux de métaux lourds apportés à Brest vont augmenter. Or, le dossier ne comporte pas d’étude de simulation de cette augmentation d’apports de métaux lourds et toxiques sur le fonctionnement de la STEP, sur la concentration dans les boues ainsi que sur l’augmentation des rejets en flux dans la Rade de Brest. D’autre part, des analyses réalisées en 2015 aux alentours de la plateforme actuelle de Plabennec ont révélé de fortes augmentations de plomb, ce qui inquiète à juste titre les riverains et les élus locaux.

Le minimum, pour réduire ces effets de rejets à l’extérieur (poussières contaminées et eaux polluées) serait de recourir à la couverture et au confinement de l'aire de stockage et de maturation des mâchefers, et ceci sans augmenter sa capacité.

Les mâchefers sont une réalité mais pas une fatalité, c'est bien pourtant le sentiment que laisse ce dossier.

Pour toutes ces raisons, l’association agréée Eau & rivières de Bretagne sollicite à titre principal un avis défavorable sur le projet tel qu’il est présenté actuellement.

Lire la déposition complète à l'enquête publique

 

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