L’EAU POTABLE ? OBLIGATIONS - DEVOIR - RESPONSABILITES

23 février 2017
L’EAU POTABLE ?  OBLIGATIONS - DEVOIR - RESPONSABILITES

Principes

Pour atteindre cet objectif, le distributeur est d'abord astreint à une surveillance continuelle de la qualité des eaux brutes prélevées dans les milieux naturels à des fins d'alimentation humaine (art. R. 1321-38 à R. 1321-42 du Code de la santé publique, et arrêté ministériel du 11 janvier 2007 - annexes II et III, issues de la directive 75/440/CEE). En effet, des eaux brutes trop polluées ne peuvent pas servir à cet usage. Les autres eaux brutes doivent subir un traitement de potabilisation, adapté à leurs caractéristiques, afin  de satisfaire aux références de qualité auxquelles doit satisfaire l’eau distribuée au robinet (art. R. 1321-3 du Code de la santé publique, et arrêté ministériel du 11 janvier 2007 - annexe I).

Des valeurs limites sont fixées pour une trentaine de paramètres, microbiologiques, chimiques. Des valeurs de référence sont également déterminées pour des paramètres - indicateurs témoins du fonctionnement des installations de traitement des eaux, et pour la radioactivité. Ces différentes valeurs, établies par arrêté ministériel du 11 janvier 2007, constituent l'exacte reprise des valeurs édictées par la directive europénne n° 98/83/CE, actualisant l'ancienne directive n° 80/778/CEE.

Ainsi, la concentration maximale est fixée à 50 mg/l pour les nitrates, à 0,1 µg/l pour chaque pesticide, et à 0,5 µg/l pour l’ensemble des pesticides, à 100 µg/l pour les Trihalométhanes...

Responsabilité

Tout distributeur, public (régie) ou privé (société commerciale délégataire), est contractuellement tenu de délivrer une eau respectant les normes réglementaires de qualité sanitaire de l’eau potable. Le contrat d’abonnement créé des droits et obligations mutuels entre les deux parties contractantes : le distributeur d’eau doit livrer de l’eau potable, et en contrepartie reçoit le produit financier des abonnements.

Il s’agit là d’une obligation de résultat : le service des eaux est donc tenu en toute hypothèse de fournir de l’eau, et cette eau doit être potable. En cas de défaillance, la responsabilité du service des eaux est donc engagée sans qu'il soit besoin de rapporter la preuve de l'existence d'une faute de ce service : l’absence de faute n’est pas, par conséquent, une cause exonératoire de responsabilité dans ce domaine.

 

Le contrôle de conformité sanitaire est réalisé au robinet de l'usager

Le non respect par l’une des parties de ses obligations entraîne sa responsabilité contractuelle.

En cas de distribution d’eau "non potable", le service des eaux peut donc voir sa responsabilité engagée devant les juridictions civiles (même si le distributeur d'eau est une collectivité locale fonctionnant en régie).
Il faut pour cela :
        - prouver par tout moyen la non délivrance d’eau, ou la délivrance d’une eau non potable,
        - agir dans un délai de 10 ans à compter des faits litigieux.

Ainsi, plusieurs procès ont été engagés, notamment en Bretagne, par des consommateurs d’eau alimentés par une eau ne respectant pas les normes de qualité d'une eau potable.

Ainsi, la délivrance d’une eau contenant un taux de nitrates supérieur à 50 mg par litre est impropre à la consommation, et de ce fait l’obligation qui pèse sur le service des eaux n’est pas remplie : Tribunal d’instance de Bayeux, 14 décembre 1995, Mme X  c/ Sté LYONNAISE DES EAUX ; Tribunal d’instance de Guingamp, 28 juin 1995, Mr. X c/ Sté LYONNAISE DES EAUX ; Cour d’appel de Rennes, 9 mai 2003, Mr X  c/ SYNDICAT D’ADDUCTION D’EAU DU TREGOR.

De même pour une eau trop chargée de pesticides : Cour d’Appel de Rennes, 14 novembre 1996, SA Compagnie Générale des Eaux ; Tribunal d’instance de Mulhouse, 11 mai 2005, Mr X c/ SAUR.

Comme il s'agit d'une obligation de résultat, la responsabilité du service des eaux est engagée sans qu'il soit besoin de rapporter l'existence d'une faute de sa part ; l’absence de faute n’est, par conséquent, pas une cause exonératoire de responsabilité en ce domaine. Le service des eaux ne peut s’exonérer de toute responsabilité qu’en cas de force majeure. Il ne sera alors pas reconnu responsable, si le non respect de ses obligations contractuelles est dû à un événement extérieur, imprévisible et irrésistible. Mais ce type d'évènement est apprécié strictement par le juge, au regard des obligations professionnelles du distributeur d'eau.

Ainsi, le Tribunal d’instance de Guingamp, dans son jugement du 28 juin 1995, considère que le mauvais état des installations ne constitue pas une force majeure. Il ne remplit aucune des trois conditions caractérisant la force majeure. De même, la Cour de Cassation, dans son arrêt du 30 mai 2006, considère que la pollution des milieux aquatiques ne présente pas les caractères d'imprévisibilité et d'irrésistibilité, excluant tout cas de force majeure.

 

Tout point d'eau non potable doit être signalé

Indemnisations

L’article 1147 du Code civil permet aux abonnés, aprés avoir mis en demeure la société de distribution de respecter ses obligations, de demander des dommages et intérêts en réparation des préjudices de toute nature subis par eux.

L’étendue du préjudice dépendra de l’appréciation des juges.

Les juges accordent généralement le remboursement des bouteilles d’eaux achetées lorsque l’eau distribuée n’est pas potable, considérant que même si l’eau n’est pas potable, elle a pu être utilisée à d’autres fins, et que la distribution n'est pas intégralement fautive, et doit donc être partiellement rémunérée.

Ainsi, le Tribunal d'instance de Bayeux dans un jugement du 14 décembre 1995 condamne le distributeur indélicat à payer aux usagers une somme correspondant au remboursement des bouteilles d'eau de source achetées pour pallier l'absence d'eau potable, sur la base de deux litres d'eau par jour (de distribution non conforme) et par membre du foyer, à raison de 0,27 €uros le litre.

La Cour d'appel de Rennes, dans un arrêt du 9 mai 2003 confirmé par la Cour de Cassation, étend ce mode de réparation à l'ensemble des années où la livraison d'eau potable a été perturbée de manière chronique, en considérant que « l’indemnisation du préjudice ne saurait être limité aux seuls jours de pollution (constatés par les relevés de la DDASS), l’intéressé ne pouvant manifestement se rendre tous les jours à la mairie pour vérifier au quotidien le respect des normes imposées ». La généralisation de la pollution des eaux en Bretagne génère en quelque sorte une réparation plus favorable aux intérêts des usagers consommateurs.

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