De retour de Notre-Dame-des-Landes... [11/04/2018]

11 avril 2018
De retour de Notre-Dame-des-Landes... [11/04/2018]

 

L'intervention des services de l'État est en cours pour expulser les habitants de la ZAD. Nos associations dénoncent une manipulation médiatique. Voir le communiqué de presse des associations du mouvement France nature environnement à ce sujet.

 

L'un de nos bénévoles est allé sur place. À son retour il a éprouvé le besoin de retranscrire dans une lettre son ressenti.

 

Lettre ouverte :

 

"Mercredi 11 avril 2018. Retour de Notre Dame-des-Landes après quelques heures de présence au cœur de la ZAD. Une question lancinante occupe mon esprit… Mais quel sens y a t-il à opposer ce déchaînement de violence à des citoyens qui ont comme principal défaut de porter le message d’autres possibles que celui qu’offre notre modèle de développement actuel ?

Ces femmes et ces hommes qui placent leurs valeurs humanistes au-dessus d’ambitions matérialistes ont pris une part déterminante dans la prise de conscience collective qui a mené à l’abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Aujourd’hui une large majorité de citoyens, de décideurs politiques et économiques reconnaissent l’inadaptation de ce projet passéiste.

En signe de gratitude, que fait l’État, soutenu semble-t-il par une majorité de Français sans aucun doute insuffisamment informés ? Faire usage de la force pour expulser manu militari ces mêmes personnes qui, par leur dévouement à des idées, par leur souci de protéger notre patrimoine universel commun, ont permis cette prise de conscience collective. Celle qui a permis le sauvetage d’un territoire d’une richesse naturelle aujourd’hui de plus en plus rare !

Ne devrait-on pas au contraire leur témoigner toute notre reconnaissance et notre gratitude pour cela ?

Notre société et notre démocratie ne sortiraient-elles pas grandies à reconnaître la dimension d’intérêt général de leur combat ? À les accompagner dans leur projet collectif d’agriculture biologique, de lieu d’expérimentation d’un mode de vie alternatif, par exemple, plutôt que de n’envoyer comme seul signal la destruction de ce qui se dessinait là ! 

Lorsque l’on parcourt ce territoire, lorsque l’on s’attarde quelques minutes sur les différentes composantes de ce mouvement, sur l’histoire de ce combat, on comprend facilement que l’usage de la force pour expulser, « éradiquer » — disait hier soir sur France Info l’élue de la République En Marche, Cécile Muschotti, — ne pourra jamais être une solution !

Il est insupportable de voir ainsi nos dirigeants politiques envoyer nos serviteurs et défenseurs de nos libertés, affronter, agresser sur ordre, en les gazant, ces citoyens de tous âges et de tous horizons, les enfants de la République qui ne demandent qu’à poursuivre leurs idées généreuses et à ce qu’on les laisse enfin en paix.

Qu’y a t-il de plus lâche et de potentiellement criminel que d’envoyer nos forces de l’ordre dont nous avons plus que jamais besoin, provoquer de la violence contre des citoyens pacifistes contraints à se défendre de cette agression ?

Faut-il rappeler que l’État par ses procédures d’expropriation a réduit les agriculteurs légitimes de cette zone eux-mêmes à une situation d’occupants illégaux, tout autant que ceux venus s’installer à leurs côtés pour les soutenir ?

Et tout cela pour quelle motivation ? Par orgueil politique ? Parce que des promesses irréfléchies ont été faites d’évacuer la ZAD? Parce que l’on préfère s’entêter à les tenir à tout prix plutôt que de reconnaitre avoir décidé trop vite de mesures inadaptées ?

Ce n’est pas en quelques semaines que l’on dépose un projet agricole, toute personne censée et au fait des procédures administratives le reconnaîtra. La concertation était engagée et un peu de temps aurait permis l’émergence de projets porteurs d’espoir sans aucune violence.

Je n’ai vu là-bas le signe d’aucun mouvement anarchiste. J’ai vu des gens ouverts d’esprits, accessibles, généreux, contraints de couvrir leur visage pour se protéger des gaz, faire preuve d’une organisation collective et d’une ingéniosité qui force l’admiration.

Où sont nos philosophes, nos intellectuels, nos politiques courageux ?

Il est urgent de cesser cette violence et de retrouver la voie du dialogue et de la raison !

J’invite tous les citoyens à se rendre sur place en nombre pour comprendre par eux-mêmes et pour exiger l’arrêt des opérations commanditées par notre gouvernement, pour le retour à une solution concertée de nécessaire régularisation de cette situation. "

A.E.

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